Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog

Yannick en Chine Récit d'un ancien étudiant français en master en Chine, grand voyageur aux quatre coins de l'empire du milieu, maintenant ingénieur dans un grand groupe français à Handan dans la province du Hebei. Étudier à Tsinghua, à Pékin, voyager et travailler en Chine, aller à la rencontre de la culture et de la langue chinoise, apprendre le mandarin ou habiter à Handan, vous trouverez de tout ici !

Trek Everest 徒步到珠峰

Cet article fait partie de la serie sur le grand voyage en Chine a l'ete 2006, au Shanxi, Tibet, Sichuan, a Hong-Kong, Nankin, et dans le Henan. Voici la page principale.



Il y a bien une route qui mene au camp de base de l'Everest (EBC), mais, comme le dit notre guide de voyage, la voie la plus satisfaisante est sans conteste le trek pour y arriver. C'est ainsi que nous nous retrouvons tous les trois a Tingri, le soir du 3 aout, pour preparer la marche des prochains jours.
Nous prevoyons 4 jours de marche jusqu'au camp de base, distant d'une soixantaine de kilometres.

Tingri est une ville rue sans aucun interet par mauvais temps. En cas de grand bleu, on est cense pouvoir voir le Cho Oyu (8513m), au fond de la vallee, mais je ne suis pas sur que cela arrive frequemment en ete. Ce qui est sur, c'est que mis a part les chiens, chevres, yaks et vaches tous plus decharnes les uns que les autres et constituant le majeure partie de la population de Tingri, se repaissant de l'eau des flaques de boue et de morceaux de carton, il y a peu a faire ici, si ce n'est trouver un guide et peaufiner les preparatifs en se fournissant au marchands en vrac du coin.

Vue dans Tingri

Image Hosted by ImageShack.us

Notre  chauffeur deniche un guide pour nous, et la se pose la grande question du jour : voulons nous des yaks ou une charrette tiree par un cheval. Les yaks sont plus tout-terrain, mais portent moins de bagages, mangent plus et sont plus lents pour la descente. Il nous faudrait payer le retour en deux jours en plus. Le cheval et sa charrette sont moins chers, ne nous demandent pas de payer le retour, mais peuvent etre plus genes en terrain delicat.

Voici les prix a titre indicatif.
yak par jour : 45Y
yakman par jour : 45Y
charrette, cheval et chauffeur par jour : 150Y

Nous hesitons : c'est plus cher de prendre des yaks, mais plus mythique. Mais il nous faut au moins trois yaks... ce qui fait (45*3+45)*6=1080Y, alors que la charrette ne coute que 150*4=600Y.
Le probleme est que par ces jours pluvieux, la piste est boueuse, et le chauffeur nous previent que l'on risque de devoir decharger la charrette une fois ou deux . Mais comme il semble que de toute maniere notre interlocuteur n'ait pas de yaks a nous proposer, le choix est vite fait.

Derniers achats : des foulards en guise d'echarpe a 5Y piece, et surtout, notre achat le plus rentable de tout le voyage : une bache en plastique de 3*2m, pour 15Y. Elle sauvera notre voyage !

Bref, le 4 aout, nous prenons la route, apres l'heure conventionnelle de retard de notre guide. Les tibetains ne sont pas des adeptes de la ponctualite, et ce n'est ni la premiere ni la derniere fois que nous le realisons !

Tout d'abord, nous sommes charges tous les trois ainsi que nos bagages sur son mini-tracteur, pour nous mener jusqu'au village ou nous attend notre monture. Le dialogue est assez delicat, car notre tibetain ne parle pas un mot de chinois. Seul le phrasebook anglais-tibetain nous permet de poser quelques questions, mais generalement pas de comprendre les reponses...


Arrives chez lui, nous avons la notre premiere experience tibetaine : un petit dejeuner dans une authentique maison de paysan tibetain ! Voir l'article sur l'habitat tibetain pour les images et films. Nous dejeunons de tsampa et de the au beurre de yak, qu'aurait on pu esperer de mieux ? Nous arrivons dans le village alors qu'un des paysans depece une chevre a meme le sol, et que les enfants jouent avec les tendons de la pauvre bete...


Apres cet intermede gastronomique somme toute pas deplaisant, c'est le fils de notre guide qui prend les renes de l'expedition, et il faut avouer que du haut de ses 12 ou 13 ans il est particulierement debrouillard. Le voila aux commandes de la charrette.


Sans comprendre pourquoi, nous nous arretons au milieu de nulle part au bout d'une ou deux heures de marche. Apres d'apres recherches dans le guide de conversation, nous comprenons que l'on attend son pere, qui doit arriver maintenant, mais ce mot prend en tibetain un sens assez particulier. Une grosse heure plus tard, apres avoir depasse l'hostilite ou la timidite d'un autre jeune berger, a coup de phrases bien senties (se resumant assez vite a demander le nom ou l'age), et surtout de biscuits sucres, le pere tant attendu nous fait l'honneur de son retour, et m'emmene meme sur sa moto jusqu'au village suivant.


C'est dans ce meme village, repondant au doux nom de Lungchang, et repertorie comme les dernieres installations humaines permanentes jusqu'a la vallee de l'Everest, que nous passons notre premiere nuit. Mais avant cela, je dois affronter une epreuve delicate. Mon statut d'invite etranger, et premier arrive au village, me donne le droit a une petite collation avec notre guide. Alors qu'il ecope d'un simple the au beurre de yak, sans doute est ce par honneur que l'on me sert un vrai repas  : un bol sale, empli de soupe a couleur (et a gout) de terre, dans lequel se debattent de vieux grains de riz mous et surnage un peu de tsampa que l'on me propose de rajouter. Inutile de dire que le resultat, autant par le gout, la couleur que la consistance, est completement infect.
Arborant un sourire comble de circonstance, j'echoue lamentablement : quand Seb et Raph arrivent une demi-heure plus tard, la moitie de ce bouillon git encore au fond de mon ecuelle. Soulage de cette delivrance et vexe par cet echec, je sors precipitamment les rejoindre, vers notre gite pour la nuit.

Nous dormons dans une des fermes du village, les vaches trainant dans la boue dans l'entree, toute la famille vivant au premier etage. Le demi-plat recemment ingurgite commence a faire son effet : je ne mets pas longtemps a me sentir mal et j'apprehende de plus en plus le repas du soir. Sagement, nous prenons quand meme du riz aux legumes servis par une des femems de la maison. La soiree se passe paisiblement en jouant aux cartes sous l'oeil amuse des tibetains, et encore plus du jeune berger nous guidant a qui nous apprenons le 8 americain.

Cette premiere etape nous laisse quelque peu sur notre faim : c'est loin d'etre harasses par une dure marche que nous nous endormons dans nos duvets sur les "canapes" de la maison. Mieux vaut prendre la precaution d'aller aux toilettes avant la nuit : les toilettes etant n'importe ou en dehors de la maison, on prefere ne pas devoir se frotter aux chiens de garde en pleine nuit...

C'est au cours du deuxieme jour de marche que commence vraiment notre trek, et que les paysages prennent une allure plus montagnarde. C'est la aussi que nous rencontrons la premiere difficulte de notre voyage. Il s'agit de traverser une riviere bien trop large pour etre sautee, et si possible sans se mouiller trop : ne prenons pas froid a 4800m, ce serait dommage !

Voici la video de ce moment dramatique...


Au moment ou la video s'arrete, nous sommes bloques au milieu du torrent, ne sachant pas trop que faire. Raph s'empresse de sauter a l'eau, Seb s'empresse de se preparer a le suivre, et je m'empresse de proteger l'appareil photo. Finalement, le sacrifice de Raph aura peut-etre ete vain, puisque le guide empeche Seb de sauter, et avec un peu de motivation le cheval nous sort de ce mauvais pas.

Voila l'etat des troupes apres la traversee.

Comme vous l'aurez peut-etre remarque, le chauffeur a change. Celui que nous avons vu a Tingi etait en fait un manager, utilisant au mieux les ressources humaines dont il dispose... Le nouveau guide ne parle evidemment pas mieux chinois que le precedent, ce qui reduit pas mal les possibilites de causette le long de la route.

Mais nous arrivons tout de meme sans encombre au bout de la premiere vraie etape, et plantons la tente juste sous le cole Nam-La (5250m), ce qui nous fait une nuit a 5200m, la plus haute de notre existence ! Entre les gamins nomades legerement envahissants, la grele qui ne manque pas de tomber quelques heures, et notre tente de basse-moyenne montagne prevue pour deux personnes avec des sacs, notre nuit sauvage ne s'annonce pas franchement facile ! C'est entasses avec tous nos sacs sous cette petite tente igloo, chauffant de l'eau pour nos pates chinoises deshydratees, que nous faisons des plans pour la nuit. Le probleme est que ces enfants des alpages ont une reputation de chapardeurs, mais nos sacs ne tiennent pas dans la tente. La bache plastique nous est alors d'une precieuse utilite, Nos bagages passeront la nuit enveloppes dans la bache hors de la tente, mais d'une maniere telle qu'il faut entrer dans la tente ou decouper la bache pour y acceder.

Le reveil est difficile mais heureusement sans pluie, et nous partons d'un pas decide vers la troisieme etape. Passe le col, 3 bonnes heures de descente nous ramenent en bas de la vallee, et une deuxieme traversee difficile de ruisseau s'annonce. Ce coup ci, le courant est trop fort pour que nous puissions monter sur la charrette. Nous cherchons donc un gue pour sauter, et voici le franchissement comme si vous y etiez !

Je passe tout d'abord en eclaireur

Puis Seb et Raph me rejoignent sur l'autre rive

Etant donne l'heure, nous decidons de tenter de rejoindre le soir meme le monastere de Rongbuk, que nous croyons assez proche. En fait, c'est encore trois bonnes heures de marche qui nous sont necessaires. Quand tout d'un coup...


Epuises et transis, nous parvenons vers 17h30 au monastere se disant le plus haut du monde (environ 5000m). Un repas chaud nous est absolument indispensable, pour calmer les ampoules de Raph, mes courbatures, et surtout le violent coup de froid de Sebastien qui grelotte sous ses quinze epaisseurs. Apres cette halte revigorante, nous decidons de monter jusqu'au camp de base, 8 km plus loin. Mais avec nos bagages et notre fatigue, pas question d'y aller a pied ! Apres avoir quitte notre charrette, ne pouvant pas aller plus loin, nous en reprenons donc une nouvelle, ou plutot deux nouvelles, a 60Y piece pour la grosse heure de trajet restant. Il pleut, il fait froid, on est epuises mais contents d'arriver enfin au camp de base ! Par contre, on ne sait pas quand on pourra voir le Qomolangma, certains attendent plusieurs jours sans en voir le sommet...

Voici un film de notre montee au camp



Nous nous endormons rapidement pour notre deuxieme nuit a 5200m,  esperant que les cieux du lendemain seront plus clements...
Retour à l'accueil
Partager cet article
Repost0
Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :
Commenter cet article